Daily Archives: 18/12/2014

Adieu Hollywood

Ce matin, j’apprends que le film adapté de ma bande dessinée Pyongyang est annulé. Je n’avais pas beaucoup de contacts avec la production et depuis maintenant deux ans que les droits ont été vendus, j’ai toujours eu connaissance des développements par voie d’internet. J’imagine que c’est la Hollywood way. Je savais que quelque part en Californie le scénario s’écrivait et jusqu’à ce qu’un acteur principal soit choisi, je n’avais aucune idée si c’était un film d’animation ou un film en prise de vue réelle. En laissant les droits à une grosse maison de production américaine, je me doutais bien qu’on ne viendrait pas me demander mon avis et ça me convenait très bien de laisser mon livre se faire adapter.

Steve Carell by Andreas Laszlo Konrath

Ce n’est qu’au début de décembre que tout est devenu beaucoup plus concret pour moi. Il y a eu l’annonce de Steve Carell dans le rôle principal, le tournage était prévu au mois de mars en Serbie et j’ai eu un coup de fil de Gore Verbinski. Il m’a parlé de la façon dont il voyait ce film, j’étais enthousiaste et aujourd’hui de savoir que tout ce projet tombe à l’eau me désole profondément (j’imagine ce que doit ressentir le réalisateur après y avoir consacré 2 ans). Enfin, ce qui me désole surtout ce sont  les raisons qui ont conduit à cette annulation.  On aurait pu imaginer qu’une grosse multinationale résisterait devant les menaces d’une bande de hackers nord coréens. Apparemment, ils ont su toucher là où ça fait mal.

En 2001, quelques mois après mon retour de Corée du Nord, j’envoyais les premières pages de mon album aux directeurs du studio de dessin animé qui m’avaient envoyé là-bas. Je pensais que ça les amuserait de lire à quoi ressemble le pays où ils produisent leurs séries télé. La réaction a été glaciale, on m’a dit que je n’avais pas le droit de parler de mon séjour là-bas, que mon contrat contenait une clause de confidentialité et que je ne pouvais pas faire ce livre.

J’en ai parlé avec mon éditeur à l’époque, L’Association, chez qui j’avais déjà fait mes premiers albums. Jean-Christophe Menu qui dirigeait cette petite maison d’édition aimait beaucoup l’idée du livre et les premières pages. On a cherché la clause de confidentialité sur le contrat sans la trouver. Finalement, il m’a dit : tant pis si on se prend un procès, c’est un livre qu’il faut faire.

 

Guy Delisle, 18 décembre 2014